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Logement social et gestion d’attente

Billet 2003-12-28

La « gestion d’attente »

La principale caractéristique qui aura été découverte à l’occasion de la rénovation des immeubles est qu’un cycle d’exploitation précède le chantier. Autrement dit, les opérateurs acquièrent des immeubles qui sont parfois productifs de revenus et souvent occasionnent des frais et ce n’est qu’ensuite qu’ils effectuent leur rénovation en recourant à des financements aidés pour enfin aboutir à un cycle d’exploitation plus normalisé. Et le premier cycle d’exploitation est très fréquemment déficitaire, d’autant plus que les délais administratifs de montage des dossiers sont longs. Ces pertes d’exploitation que certains praticiens nomment la « gestion d’attente » sont, la plupart du temps, à la charge de l’opérateur qui ne dispose pas de fonds propres importants de sorte que sa situation financière en est substantiellement obérée. Pour éviter un tel inconvénient, deux solutions sont envisageables.

La couverture des pertes de l’opérateur

L’idée est simple qui consiste à prévoir que les pertes de la période de « gestion d’attente » soient couvertes de sorte que l’opérateur n’ait pas à les supporter. Mais cette simplicité se complique sérieusement lorsqu’il faut la mettre en pratique.

Certains opérateurs n’ont pas hésité à penser que ces pertes devaient être incorporées au bilan de la rénovation de l’immeuble et que le plan de financement devait les couvrir. Si une telle pratique a pu exister ici ou là, elle ne saurait être recommandée :

  • d’abord parce qu’il est illusoire de croire, contre toute règle comptable qui s’impose comme du plus élémentaire bon sens, que des pertes d’exploitation puissent abonder le coût de revient d’un immeuble ; et il faut souligner que de telles pratiques confortent les critiques fondées sur l’amateurisme ou le manque de transparence des opérateurs de rénovation urbaine ;
  • ensuite parce que les financements aidés qui existent sont destinés à couvrir des investissements et non pas des résultats d’exploitation.

La solution la plus raisonnable consisterait ainsi à prévoir, lors du montage d’une opération de rénovation d’immeuble, que les pertes de la gestion d’attente soient couvertes par des fonds à verser à l’opérateur.

  • Il est plus que probable qu’un tel financement devrait être d’origine publique, et l’on pense immédiatement aux collectivités territoriales pour de tels apports.
    • Et cette idée peut être confortée lorsque l’opérateur de rénovation d’immeubles agit à l’initiative de ces collectivités : il en va notamment ainsi lorsque le bien à rénover appartient à la collectivité et qu’il est donné à bail ou vendu à l’opérateur.
    • Plus compliqué sera le cas des biens appartenant à des particuliers et vendus ou donnés à bail à l’opérateur car l’on peut alors donner à penser (même si ce raisonnement ne tient pas après une analyse économique rapide) que des fonds publics bénéficient à des particuliers.
  • Le statut des « SCIC », tel qu’il existe, permet aux collectivités territoriales d’en subventionner le fonctionnement et l’on peut parfaitement imaginer d’utiliser cette argumentation pour fonder une couverture des pertes de la gestion d’attente par les collectivités territoriales. Mais il est fort probable qu’une analyse juridique approfondie permettrait de conclure que la rénovation d’immeubles en mauvais état est une activité d’un intérêt général suffisant pour qu’il soit possible d’en subventionner la « gestion d’attente », quel que soit l’opérateur et son statut : SEM, association…

La suppression des pertes de l’opérateur

Une autre idée, tout aussi simple, consisterait à monter les dossiers de rénovation d’immeubles de telle sorte que l’opérateur n’ait pas à supporter le risque financier de la « gestion d’attente ». C’est que la « gestion d’attente » couvre une période commençant lorsque l’opérateur devient propriétaire du bien immobilier ou détient un droit réel dessus (bail) et s’achevant au début du chantier. Si l’on parvient à retarder la prise de possession du bien ou du droit réel immobilier par l’opérateur au moment du début du chantier, la période de la « gestion d’attente » est réduite à néant.

Comme de telles opérations sont menées, la plupart du temps, dans le cadre de baux à réhabilitation, il s’agirait de retarder la prise d’effet du bail à une étape suffisamment avancée du montage du dossier et proche de l’ouverture du chantier pour qu’il n’y ait pas à prendre en charge de « gestion d’attente ».

  • Ce serait, par exemple, la signature de la convention avec l’État ou la dernière décision de financement ou encore l’obtention du permis de construire. Et rien n’empêcherait de prendre toutes précautions en prévoyant que la prise d’effet du bail se situe à la dernière de ces étapes.
  • La forme de telles précautions de la part de l’opérateur (sous réserve d’une validation juridique, probablement du chef des notaires en charge des dossiers) serait l’insertion dans les baux de conditions suspensives de la conclusion d’une convention avec l’État, de l’obtention des financements aidés, du permis de construire…

Pour le cas, probable, où il serait estimé que l’opérateur de la rénovation doit cependant accomplir les tâches de la « gestion d’attente » à raison des compétences sociales qu’il détient et qu’il exerce dans son activité, il faudrait alors prévoir une solution.

  • Cette solution peut consister en un mandat de gestion pendant la phase de montage administratif du dossier de rénovation. Dans cette hypothèse, l’opérateur ferait le travail mais sans en supporter les conséquences financières puisqu’il agirait alors au nom et pour le compte du propriétaire du bien.
  • S’agissant d’un réel travail, il pourrait, au surplus, être fait application de l’adage : « tout travail mérite salaire » et rémunérant l’opérateur pour sa mission de « gestion d’attente ».
  • Sur ce point, il serait sans doute possible de prévoir une clause dans les baux conclus détaillant les conditions et les modalités d’un tel mandat pour la période allant de la signature de l’acte à sa prise d’effet.

Il faut aussi citer, pour mémoire, voire pour utilisation, le fait que les exonérations foncières dont bénéficient les organismes sans but lucratif qui acquièrent des logements destinés à des personnes défavorisées peuvent prendre effet, au choix, soit l’année suivant l’achèvement des travaux, soit l’année suivant celle de l’acquisition. Dans le cas où le délai d’instruction des dossiers est long, il peut y avoir intérêt à choisir la seconde solution pour réduire le coût de la gestion d’attente.

Préconisation

Un des avantages, et non des moindres, de la solution de la suppression des pertes de l’opérateur serait de clarifier son rôle et ses missions qui consistent à intervenir dans un but d’intérêt général sur l’initiative et des fonds publics. Elle est donc recommandable.

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